Avant et après Freddy

Les Montréalais ont appris où était Montréal-Nord il y a deux ans… Avant, personne ne s’y attardait, ne s’y aventurait. Comme au Far West, seuls les braves, les durs de durs défiaient les frontières de l’est!

Encore aujourd’hui, Montréal-Nord a une très mauvaise réputation. On l’appelle Montréal-Noir tout bas, au nom de la rectitude politique.

Pourtant, Montréal-Nord est un quartier tranquille, comme on en trouve tant à Montréal. Un quartier résidentiel multiculturel qui offre les mêmes services que les autres arrondissements de la grande ville de Montréal.

Il faut savoir que la problématique de mauvaise réputation qu’on retrouve à Montréal-Nord a plusieurs causes. Cette mauvaise réputation a entraîné des problèmes sociaux importants qui continuent d’envenimer certains quartiers de l’arrondissement.

Avec la gentrification de d’autres arrondissements de Montréal, dont le secteur Est de Rosemont, Hochelaga-Maisonneuve, La Petite Bourgogne… où sont allés les plus démunis qui ont vu leurs appartements être transformés en condos? Vers le nord-est! La gentrification tranquille de plusieurs quartiers de Montréal a permis une ghettoïsation de Montréal-Nord.

Avant la fusion municipale, Montréal-Nord était une ville… une ville où le plan d’urbanisme a été dessiné sur un coin de table, ça c’est s’il y en avait un! On a permis la construction d’innombrables immeubles locatifs dans le secteur Est (ce qu’on appelle communément le ghetto ou le bronx) sans penser que ça pourrait avoir des conséquences sociales…

Ainsi, on retrouve dans ce secteur (la quadrilatère déterminé par les rues Maurice-Duplessis, Pascal, Léger et Langelier) des immeubles à logements en décrépitude, des ruelles sans issues, des rues qui ne mènent nulle part et tout ça, sans supermarchés ou commerces de service à proximité. Les dépanneurs et magasins de cossins pullulent par contre. Une architecture urbaine qui rappelle davantage l’Allemagne de l’Est que Montréal…

La population qui habite dans les logements de ce secteur doivent sortir du secteur pour avoir accès à de la nourriture fraîche et de qualité ou encore à des services de proximité. Mais l’offre d’accès des transports en commun n’est pas la meilleure en ville….

Et pour couronner le tout, les politiques sociales étaient quasi-inexistantes pour ce secteur de l’arrondissement avant les fusions municipales. Ainsi, on a laissé un minuscule quartier de Montréal-Nord prendre d’assaut cette ville désormais arrondissement.

Tout ça a entraîné des problèmes sociaux… Avant Freddy, il y avait déjà des problèmes sociaux. Les jeunes demandaient d’être écouté, les gens de couleur demandaient d’être représenté au conseil d’arrondissement, la tension entre la police et les jeunes du quartier était palpable. Il ne faut pas penser que tout a commencé il y a deux ans!

Le parc Henri-Bourassa a toujours été un repère de bums, comme il en existe dans chaque arrondissement… Situé à côté de l’école secondaire du même nom, ce parc est reconnu comme un lieu à ne pas fréquenter seul le soir. Depuis plusieurs années, même avant Freddy, les autorités de l’arrondissement tentaient d’éviter les attroupements de jeunes dans ce parc. Les policiers patrouillent souvent le parc, non pas à la recherche de membres de gangs de rue, mais pour s’assurer de la sécurité du quartier, car les bums envahissent le parc dès la nuit tombée. On a rénové les installations du parc, créé un jeu de bocce pour que les citoyens du quartier s’approprient le parc. Mais ces efforts ont été en vain. C’est donc normal que la police s’y trouve encore souvent et qu’on tente encore d’éviter les rassemblements de jeunes. Du profilage racial? J’en doute…

Les citoyens de Montréal-Nord, dont je fais partie, sont majoritairement tannés d’entendre parler de Montréal-Nord comme un trou à rats, un ghetto où on risque de se faire flinguer à toute heure du jour ou de la nuit. Montréal-Nord est un quartier paisible mis à part le secteur Est.

Mais encore plus depuis Freddy, car les médias raffolent de se genre d’histoire, on généralise… Chaque fois que je dis habiter à Montréal-Nord, je constate la même réaction: « C’est pas un beau quartier, ça », « T’as pas peur d’habiter là? », « C’est les gangs de rue qui ont le contrôle dans ce coin-là »… Mais tout ça, ce ne sont que des préjugés, des préjugés véhiculés principalement par les médias, qui depuis deux ans, s’acharnent sur une problématique qui touche une parcelle d’un quartier qui se meurt sous une mauvaise réputation.

Chaque fois qu’un journaliste parle d’un crime commis « dans le nord de Montréal », tout le monde se dit que ça se passe à Montréal-Nord alors que d’autres arrondissements sont tout aussi problématiques. Il faut arrêter de généraliser. Il faut connaître ce dont on parle avant d’avancer certaines choses. Et c’est pas en habitant une semaine dans un appartement de la rue Pascal qu’un journaliste peut se faire une idée de tout un quartier comme l’ont fait certains lors des émeutes il y a deux ans.

Tant que les médias parleront de Montréal-Nord comme un quartier « chaud » de Montréal, le secteur Est restera sous tension. Qu’on laisse les gens vivre en paix… qu’on laisse les gens faire leur deuil… Une manifestation de 100 personnes est-elle vraiment pertinente, et ce en début du bulletin national? J’en doute.

Publié par Mariève Paradis

Fille de mots, passionnée de plein air et mère de 2 tannants

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1 commentaire

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  1. Merci pour ces précisions. On se doute bien que l’image que renvoie les médias magnifie certains détails pour en omettre d’autres, mais si on ne va pas à Montréal-Nord (pas par peur, mais juste parce que « ça adonne pas »), on n’a aucun moyen de savoir ça.

    J’ai habité deux quartiers de l’arrondissement Sud-Ouest pendant 10 ans (OMG. Dix ans.) et je peux te dire que les préjugés ont la vie dure là aussi.

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